Difficulté

Introduction

Tel qu’écrit par ailleurs dans ce blog, j’apprécie l’activité de restauration automobile, car elle procure parfois des petits moments de bonheurs inattendus. Ce fût le cas, juste après la rénovation du carburateur !

Non content d’avoir démarré la W115 dès le premier tour de clé – ce qui n’était plus arrivé depuis fort longtemps – une bonne surprise est arrivée quelques jours plus tard…

Bernard et moi voulions parfaire le ralenti du moteur. Un mécanicien inexpérimenté dirait qu’il suffit de jongler avec les deux vis de réglages du carburateur. Dans la pratique, c’est  un exercice qui requiert expérience, patience, observation des réactions du moteur et subtilité dans les réglages apportés.

Je me suis plongé dans le manuel d’atelier pour comprendre la théorie, avant de m’initier à la pratique avec Bernard, dont l’expérience sur ce sujet était un atout précieux.

Toutefois, c’est en me documentant que j’ai appris qu’avant de s’attaquer au délicat réglage du ralenti, Mercedes-Benz recommande fortement et préalablement de contrôler la compression des cylindres. C’est devenu une évidence en le lisant, mais ça ne l’était pas pour moi cinq minutes plus tôt. En effet, comment essayer d’améliorer le ralenti de quelque chose, si ce quelque chose ne fonctionne pas de manière optimale en fonctionnement «normal» ?

Rendez-vous était donc pris avec Bernard pour cet exercice. Il va sans dire qu’il dispose de l’outil indispensable pour cela : un compressiomètre, aussi dénommé sonde de compression.

Cet outil permet de mesurer la pression de compression réelle disponible d’un piston à son point mort haut….

OK : un peu d’explications 🙂 et quelques rappels élémentaires : la majorité des moteurs de l’ère moderne sont ce qu’on appelle généralement – et de manière inappropriée – des «moteurs à explosion». D’une façon plus précise, il s’agit de moteurs à combustion interne, car heureusement pour nous, les moteurs n’explosent pas en général ! Et dans cette catégorie de moteurs à combustion interne, la majorité des moteurs automobiles sont ce qu’on appelle des moteurs «à quatre temps» ; ce qui correspond aux quatre phases qu’un piston réalise de manière cyclique à l’intérieur d’un cylindre :

  1. admission : le mélange stoechiométrique est aspiré par un cylindre,
  2. compression : un piston comprime le mélange dans le cylindre,
  3. combustion : une étincelle provoque la combustion (détonation) du mélange comprimé dans le cylindre,
  4. échappement : les gaz générés par la combustion sont évacués, et finissent expulsés par le pot… d’échappement !

Pour les plus curieux, internet regorge d’explications plus détaillées que la mienne, notamment la page wikipédia «moteur a combustion et explosion», et dont je reprends une animation plus bas, mettant en image les 4 phases précitées.

Le point mort haut (=PMH) correspond à l’instant où le piston atteint sa limite la plus haute dans le cylindre. En terme physique, c’est l’instant dans le cycle (après la compression et avant la combustion) où le piston n’est plus sous l’emprise d’aucune force mécanique.

(C) UtzOnBike

(C) UtzOnBike

La compression réelle : elle correspond à la force maximale exercée par le piston à l’intérieur  du cylindre. Autrement dit, c’est sa capacité à «bien» comprimer. Une compression inférieure à la valeur de référence révèle généralement un problème d’étanchéité (pouvant avoir plusieurs origines possibles) et donc un moteur moins performant, développant moins de puissance qu’attendue. La valeur de référence est indiquée par le constructeur.

Présentation du compressiomètre

C’est un instrument constitué de deux parties principales :

D’un côté : un embout comprenant un capteur de pression, à positionner dans la gorge de la bougie précédemment déposée,
De l’autre : une aiguille dans un cadran. Sur le modèle de Bernard, une fiche cartonnée graduée se loge derrière l’aiguille. Cette dernière contient de l’encre, pour retranscrire la courbe des compressions capturés par l’embout. La fiche cartonnée peut être déplacée manuellement sur son axe vertical, ce qui permet de faire jusqu’à huit mesures sur la même fiche, et d’en conserver une trace complète (une trace par cylindre). Un peu comme sur les anciennes stations météos d’antan, ou comme sur les détecteurs de mensonges que l’on voit régulièrement dans les séries US. Je suppose qu’il existe maintenant des versions modernisées et numériques, mais la W115 ne possède pas (encore) de prise USB 🙂 !

Vérification des compressions - Mercedes 200 /8 W115 1972 www.passionw115.fr

Le compressiomètre

Vérification des compressions - Mercedes 200 /8 W115 1972 www.passionw115.fr

Le compressiomètre

Procédure de mesure

Il faut être deux pour réaliser cette mesure.

  1. Faire préalablement tourner le moteur jusqu’à ce que l’eau de refroidissement atteigne 70° minimum,
  2. Dévisser et déposer les quatre bougies d’allumage,
  3. Astuce de Bernard : déconnecter électriquement la bobine : cela empêche la création potentielle d’arcs électriques sur les faisceaux, et cela évite au mécanicien de se prendre de désagréables «châtaignes» !
  4. Positionner et maintenir fermement l’embout du compressiomètre dans la gorge de la bougie,
  5. Faire tourner le moteur au démarreur : entre 4 et 6 tours, idéalement le même nombre de tour pour chaque cylindre à mesurer.

Les bougies étant déposées, c’était une opportunité d’en vérifier l’état. Sur la W115, nous avons constaté qu’elles étaient noircies. Bernard m’a expliqué que c’est le signe d’un mélange trop riche (=proportion d’essence trop importante).

Vérification des compressions - Mercedes 200 /8 W115 1972 www.passionw115.fr

Bougies noircies

Heureusement, ce  n’est pas une situation critique. Selon Bernard, ceci peut s’expliquer par différentes raisons :

Mauvais réglage de la richesse sur le carburateur,
La W115 ne roule pas assez: le moteur ne monte pas suffisamment en température, n’est pas assez sollicité.
La cause peut aussi trouver son origine dans un défaut de qualité de l’essence. Comme beaucoup d’anciennes, la W115 roule au super 95 avec un additif de plomb. Il n’est pas impossible que j’ai mal dosé l’additif dans le passé.

Mesure de la compression en image

La vidéo illustre une prise de compression sur un cylindre :

Résultat

Le résultat des mesures des quatre cylindres était donc la très bonne nouvelle du jour : la W115 à la santé d’une jeunette ! Vu sous l’angle des compressions, elle paraitrait presque plus jeune que son âge !

Les quatre cylindres sont au rendez-vous des 8 bars, ce qui est conforme aux valeurs du manuel d’atelier. Les trois courbes sont quasiment parallèles et progressives…

Bref : QUE DU BONHEUR ! 🙂

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Résultat des mesures